Bún thang de Hanoi (une spécialité culinaire de Hanoi)

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La soupe bún thang, sophistiquée aux saveurs délicates, tient une place privilégiée dans le cœur des Hanoiens. Quand on évoque la gastronomie de Hanoi à l’étranger, on pense d’abord à la soupe pho parce que celle-ci a été largement diffusée internationalement. Pourtant, la cuisine du nord regorge bien d’autres trésors, hélas moins connus en dehors du pays. Parmi ceux-ci, la soupe bun thang dont l’origine remonte bien avant la soupe pho, se dégustait au quatrième jour après le nouvel an dans l’ancien temps, avant de devenir un plat populaire, une des spécialités de Hanoi.

Photo prise à Hanoi durant un de mes voyages.

Photo prise à Hanoi durant un de mes voyages.

Photo prise à Hanoi durant un de mes voyages.

Photo prise à Hanoi durant un de mes voyages.

Que signifie bún thang ? Les bún sont les vermicelles de riz comme ceux utilisés dans les fameux bo bun (bo = bœuf / bun = vermicelles de riz). Thang, originaire de l’ancien chinois (chữ hán), signifie bouillon, soupe. Littéralement, vermicelles de riz au bouillon… Cela montre bien toute l’importance du bouillon dans ce plat. Cette appellation simple cache pourtant une des soupes les plus sophistiquées à réaliser et une des plus raffinées à déguster.

Qu’est-ce le bún thang ? C’est un plat complet à base de bouillon clair de poule (ou de poulet), de poulet effiloché, de coriandre vietnamienne (polygonum, en vietnamien, rau răm), de mortadelle de porc (giò lụa), d’omelette fine, de navets marinés, de shiitaké séchés (champignons parfumés), de coton de crevettes, de vermicelles de riz et selon goût, des œufs durs salés de cane. En réalité, il n’y a pas moins de vingt ingrédients différents. Les critères de qualité de ce plat se mesurent à la saveur et à la limpidité de son bouillon, à la préparation minutieuse de chaque garniture, et à la présentation du plat en forme de fleurs à cinq couleurs (hoa ngũ sắc).

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Autrefois, ce plat était réalisé après la fête du Têt (nouvel an vietnamien). En effet, après le troisième jour du Têt où un grand repas d’adieux est servi pour raccompagner les défunts et les ancêtres au ciel, un repas léger à base de soupe était alors très apprécié au quatrième jour du Têt. Pour éviter le gaspillage, les anciens réutilisaient tous les restes des plats du nouvel an, pour garnir leur soupe avec vermicelles de riz. Cela explique pourquoi on retrouve dans ce plat, les ingrédients les plus répandus des plats du Têt dans le nord : du poulet, de la mortadelle, du porc, des crevettes, des navets séchés marinés, des œufs… Mais faire de la récupération ne signifiait pas tout mettre n’importe comment. Les saveurs et l’esthétisme du plat étaient de rigueur. Aujourd’hui, ce plat devenu populaire n’est plus réalisé avec les restes des plats du Têt, a évolué avec le temps en adaptant certains ingrédients d’origine et se déguste tout au long de l’année.

Marche Dong Xuan HANOI photo La Kitchenette de Miss Tam

Etal de crevettes, calamars et poissons séchés. Au marché Đồng Xuân, lors de mon voyage à Hanoi.

Le bouillon a une place si primordiale dans ce plat qu’utiliser des cubes de bouillon de volaille serait un sacrilège. Le bouillon est à base de poule ou de poulet entier, d’os de porc, de crevettes et de calamars séchés, d’oignons et de gingembre. Parfois on trouve aussi dans le bouillon, des vers marins séchés (sà súng) très prisés dans la cuisine du nord. Pour obtenir la limpidité recherchée du bouillon, il faut suivre une certaine méthode de cuisson, qui est valable pour toutes les bases de bouillon vietnamien : faire bouillir rapidement une première fois les os, les carcasses ou le poulet entier, rincer à l’eau froide, et remettre les os, carcasses ou poulet nettoyé dans la marmite à l’eau froide pour la deuxième cuisson. Le feu ne doit jamais être fort, pour éviter que les résidus ne troublent le liquide. La cuisson lente permet de libérer toutes les saveurs des os et du poulet. Puis on ajoute les aromates et on assaisonne. Le bouillon naturel est toujours cuit lentement à feu moyen-doux pendant des heures… Au minimum trois heures et au mieux, cinq à six heures. Lorsque le bouillon réduit, il faut rajouter de l’eau bouillante pour conserver la limpidité du liquide.

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En dehors du bouillon, la composition des garnitures de la soupe bun thang exige une préparation longue et minutieuse. Chaque ingrédient a son importance. Tout doit être coupé en julienne, en fines lamelles. La soupe bun thang ne serait pas le bun thang s’il n’y avait pas un peu de mắm tôm, pâte de crevettes en saumure fermentées, que l’on rajoute dans le bol de soupe avant de servir. Mais la touche finale reste l’ajout de l’essence de bélostrome ou nèpe aquatique, le cà cuống, d’une pointe de cure-dent trempée dans ce nectar rare et précieux, issu de la phéromone mâle de la nèpe (une sorte de punaise aquatique), très précieuse, hors de prix et introuvable en France. Cette essence à utiliser au compte-goutte, offre un parfum floral puissant très typique que l’on retrouve dans certains plats du nord, comme dans la sauce nuoc mam pour les banh cuôn (raviolis vietnamiens).

Comme souvent pour les soupes vietnamiennes avec pâtes, vermicelles de riz ou nouilles de blé, il existe aussi une variante « sèche » : le bún thang khô (khô = sec). Toutes les garnitures sont présentes dans le bol avec les vermicelles de riz et un bol de bouillon est servi à côté.

Dans la recette que je vous propose ci-après, basée sur la recherche de multiples sources d’information, vous constaterez que chaque élément a sa propre préparation qui demande du temps. Réaliser chez soi une soupe bun thang n’est pas à faire au quotidien mais c’est une plongée culinaire qui en vaut la peine quand on aime découvrir la cuisine vietnamienne.

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La recette de la soupe bún thang

Pour 6 à 8 grands bols de soupe

Temps de préparation (long et en plusieurs étapes) : au total 1h30 – Temps de cuisson : 4 à 6 heures

Ingrédients :

Bouillon :

  • 1 poule ou poulet fermier (1,2 kg)
  • 1 kg d’os de porc
  • 2 oignons entiers grillés
  • 1 gros morceau de gingembre non pelé, grillé
  • 6 petits calamars séchés et grillés
  • 100 g de crevettes séchées réhydratées
  • 1 litre d’eau de trempage des crevettes séchées
  • 8 têtes de champignons parfumés séchés (shiitaké)
  • Sel, nuoc mam pur (saumure de poisson pure), sucre candi, poivre

Crevettes sechees La Kitchenette de Miss Tam

Garniture :

  • 3 œufs battus
  • 1 cuillère à soupe de vin blanc
  • 200 g de gio lua (mortadelle vietnamienne)
  • 200 g de radis blanc ou navet en saumure séchés (sous vide, en vente dans les magasins d’alimentation asiatique)
  • Ciboule chinoise ou oignon vert
  • Rau răm (coriandre vietnamienne / polygonum)
  • 200 g de crevettes crues entières + 4 cuillères à soupe de nuoc mam pur + 2 cuillères à soupe de sucre en poudre

Navets seches La Kitchenette de Miss Tam 1

Accompagnement :

  • Mắm tôm (pâte de crevettes en saumure fermentée – en pot et en vente dans les magasins d’alimentation asiatique)
  • 1 citron vert en quartiers (coupé en 8)
  • Piment frais
  • Rau răm (coriandre vietnamienne / polygonum)

Mam tom La Kitchenette de Miss Tam

Préparation :

Bouillon :

  • Laver les os de porc et la poule (ou le poulet).
  • Dans une grande casserole ou marmite d’eau, ébouillanter les os de porc, jeter l’eau de première cuisson et rincer abondamment les os. Remettre les os de porc dans la marmite et remplir de 3 litres d’eau froide. Cuire sur feu fort jusqu’au premier bouillon, puis baisser rapidement à feu moyen-doux, sans couvrir, ajouter 1 cuillère à café de sel et laisser mijoter une heure.

Os de porc pour bouillon La Kitchenette de Miss Tam

Os de porc bouillon La Kitchenette de Miss Tam 2

  • Peler les oignons, laver le morceau de gingembre. Les faire griller soit directement sur la flamme soit sous gril au four quelques minutes (jusqu’à ce que la peau soit un peu grillée).

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  • Dans une grande marmite (pouvant contenir 5 litres au minimum) contenant 4 litres d’eau froide, cuire la poule ou le poulet entier. Dès ébullition (compter environ 15 minutes), ajouter les oignons entiers et le morceau de gingembre grillés. Ajouter 2 cuillères à soupe de sel. Réduire à feu moyen-doux (juste de quoi maintenir un léger frémissement du bouillon), et laisser cuire la poule ou le poulet pendant une heure.

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  • Pendant l’heure de première cuisson du bouillon de poule, laver et faire tremper les crevettes séchées dans 1 litre d’eau bouillante, pendant 30 minutes. Puis filtrer l’eau de trempage pour bouillon. Réserver les crevettes.

Crevettes sechees La Kitchenette de Miss Tam 2

  • Réhydrater les champignons parfumés séchés (shiitaké) dans un grand bol d’eau tiède.
  • Faire griller rapidement les calamars séchés soit au four, soit à la poêle, soit quelques secondes au four à micro-ondes. Ca va sentir fort dans la cuisine !

CALAMARS SECHES La Kitchenette de Miss Tam

  • Dès que la poule (ou le poulet) est cuite, la/le sortir du bouillon et la/le faire tremper dans l’eau froide. Désosser complètement la poule (ou le poulet), réserver la chair, et remettre la carcasse et les os de cuisse dans le bouillon.

Poulet cuit pour bouillon La Kitchenette de Miss TamPoulet cuit La Kitchenette de Miss Tam 3Poulet cuit La Kitchenette de Miss Tam 4

  • Filtrer le bouillon d’os de porc. À ce stage, le bouillon aura réduit de moitié, soit il reste 1,5 litre. Verser le bouillon réduit dans le bouillon de poule.

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  • Ajouter dans le bouillon : calamars séchés grillés, shiitaké, l’eau de trempage des crevettes séchées, quelques morceaux de sucre candi (1 cuillère à soupe) et 3 cuillères à soupe de nuoc mam pur. Laisser réduire durant 2 à 3 heures à feu moyen-doux.

Garniture :

Poule / poulet

  • Effilocher la chair de la poule ou du poulet ou trancher finement au couteau. Réserver.

Poulet cuit La Kitchenette de Miss Tam 6

Omelette

  • Dans un bol, battre les œufs légèrement et ajouter une cuillère à soupe de vin blanc et une pincée de sel.
  • Verser une louche d’œufs battus dans une poêle légèrement huilée et chaude, répartir la quantité d’œufs battus uniformément sur toute la surface de la poêle, et reverser l’excédent dans le bol pour obtenir une omelette fine comme une feuille. Cuire rapidement sur une seule face sans faire dorer l’omelette.
  • Renverser l’omelette sur une planche et réaliser la suivante. Laisser refroidir. Enrouler plusieurs couches d’omelettes fines puis trancher très finement de façon à obtenir de très fines lamelles.

Omelette fine La Kitchenette de Miss Tam 1Omelette fine La Kitchenette de Miss Tam 2Omelette fine La Kitchenette de Miss Tam 3

Crevettes

  • Cuire les crevettes entières pendant 2 à 3 minutes à l’eau bouillante.
  • Les plonger dans l’eau froide. Décortiquer, supprimer têtes et queues de crevettes. Piler au mortier pour ne pas casser la fibre et pour obtenir des miettes de crevettes.
  • Chauffer un peu d’huile dans une poêle, faire revenir les miettes de crevettes pilées avec 4 cuillères à soupe de nuoc mam pur et 2 cuillère à soupe rase de sucre. Facultatif : verser une cuillère à café d’huile au rocou (pour colorer les crevettes en rouge brique). Laisser refroidir et réserver.

Coton de crevettes La Kitchenette de Miss Tam 2

Ruôc Tôm de La Kitchenette de Miss Tâm crevettes poudre 2

Radis / navet séchés marinés en saumure

  • Laver et réhydrater les lamelles de radis séché à l’eau tiède dans un bol pendant 30 minutes. Rincer à l’eau bouillante, égoutter et laisser refroidir avant de les faire mariner avec 1 volume de vinaigre de riz (blanc) et ½ volume de sucre pendant au moins 30 minutes.

Navets seches La Kitchenette de Miss Tam 2

Giò lụa (chả lụa) ou mortadelle vietnamienne au porc (en vente dans les magasins d’alimentation asiatique ou à faire soi-même ici)

  • Trancher très finement de rondelles puis en fines lamelles (allumettes très fines). Réserver.

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Champignons parfumés (shiitaké)

  • Sortir les champignons du bouillon, les égoutter puis les trancher finement en lamelles. Réserver.

Rau răm (polygonum ou coriandre vietnamienne) et ciboule chinoise (partie verte)

  • Laver, essuyer les feuilles de rau ram et les tiges de ciboules chinoises. Ciseler finement les feuilles de rau ram et la partie verte de la ciboule. Réserver.

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Vermicelles de riz (bún)

  • Cuire les vermicelles de riz à l’eau bouillante, réduire à feu moyen-vif pendant 8 minutes (ou selon le temps indiqué sur le paquet).
  • Rincer à l’eau froide pour arrêter la cuisson et égoutter. Réserver.

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Bouillon

  • 30 minutes avant de servir, filter le bouillon (pour obtenir un bouillon limpide) et le remettre sur le feu jusqu’à ébullition.
  • Goûter, rectifier si nécessaire l’assaisonnement.

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Dressage des bols :

  • Dans un bol, déposer une portion de vermicelles de riz.
  • Parsemer d’un peu de rau ram et de ciboule.
  • Déposer une petite portion égale de chaque ingrédient de la garniture (poulet effiloché, mortadelle, champignons parfumés, radis ou navets séchés, lamelles d’omelette, coton de crevettes, ciboulette chinoise, coriandre vietnamienne…).
  • Option avec œufs durs salés de cane (déjà prêts à consommer, en vente dans les grands magasins d’alimentation asiatique) à écaler et à couper en deux. Déposer les demi-œufs salés au centre.
  • Verser en dernier le bouillon frémissant et ajouter 1/3 de cuillère à café de mắm tôm (pâte de crevettes en saumure fermentées).
  • Servir chaud avec en accompagnement dans de petites coupelles, le piment, les quartiers de citrons verts, la coriandre vietnamienne rau răm et un peu de mắm tôm.

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Une fois que vous avez goûté à cette merveilleuse soupe bun thang (idéalement, à Hanoi), vous garderez un souvenir impérissable de la richesse de saveurs et de parfums dans ce plat, d’une délicatesse égale à celle des habitants de Hanoi. Bonne découverte !

Deux belles Hanoïennes devant le lac Hoàn Kiêm, Hanoi. Toute la grâce et la délicatesse des femmes de Hanoi. Photo prise durant mon voyage à Hanoi.

Deux belles Hanoïennes devant le lac Hoàn Kiêm, Hanoi. Toute la grâce et la délicatesse des femmes de Hanoi. Photo prise durant mon voyage à Hanoi.

Une marchande de Hanoi, photo prise durant un de mes voyages.

Une marchande de Hanoi, photo prise durant un de mes voyages.

Boulettes de boeuf vietnamiennes (bò vò viên)

Bo Vo Vien de La Kitchenette de Miss Tam 11

Connaissez-vous les délicieuses boulettes de bœuf vietnamiennes (bò vò viên ou littéralement, bœuf roulé en boulettes) ? On les sert essentiellement dans un bouillon de bœuf, seules ou avec des nouilles de riz, ou encore accompagnées d’autres morceaux de bœuf comme dans la soupe phở à la mode du sud du Vietnam.

C’est un mets que les Vietnamiens (petits et grands) adorent, et qui a été largement diffusé à l’étranger par la diaspora. Dans le sud, ces boulettes de bœuf se dégustent en soupe, comme plat principal ou comme snack. On aime les tremper dans la sauce au piment, mais aussi dans la sauce chinoise Hoi sin (en vietnamien tương đen, sauce à base de graines de soja fermentées sucré-salé).

Mon père raffole de ces bonnes boulettes de bœuf, surtout dans la soupe phở qu’il déguste à la mode du sud (en bon Vietnamien du sud), à savoir avec une grande variété de viande de boeuf cuite, des tendons bouillis et bien sûr des boulettes. Il les aime bien dodues, élastiques et savoureuses, qu’il trempe généreusement dans la sauce Hoi sin additionnée de sauce au piment fort Sriracha. Un Vietnamien de Hanoi serait horrifié de voir “sa” soupe phở au boeuf tant dénaturée par l’abondance indécente d’ingrédients non conformes à la recette raffinée d’origine du nord. Sachez que si vous voyez une coupelle de sauce Hoi sin et de sauce Sriracha à votre table pour accompagner votre soupe phở, c’est la version du sud dans votre bol !

Bo Vo Vien de La Kitchenette de Miss Tam 7

En France, on peut acheter ces boulettes de bœuf déjà prêtes à l’emploi, en paquet, au rayon frais des produits cuisinés dans les grands magasins d’alimentation asiatique (comme Paris store ou Tang Frères entre autres), pour quelques euros seulement. Mais les confectionner soi-même est bien meilleur et surtout si faciles à faire !

Et même simple et facile, la recette de boulettes de bœuf vietnamiennes varie d’une famille à l’autre. Si la présence du nuoc mam est essentielle, certaines variantes proposent de la sauce d’huître en remplacement. On peut aussi y ajouter du poivre noir concassé, de l’huile de sésame (mais je déconseille) ou des bouts de tendons pour rendre ces boulettes encore plus élastiques en bouche. Souvent, les Vietnamiens assaisonnent encore avec du bouillon en poudre ou du glutamate. En ce qui me concerne, je reste sur les condiments basiques que je trouve suffisants pour retrouver le goût si addictif et l’élasticité recherchée pour ces boulettes de bœuf. Mais faites des tests et rectifiez l’assaisonnement selon votre goût.

Recette de boulettes de boeuf vietnamiennes (bò vò viên)

Pour 20 à 30 boulettes de bœuf.

Ingrédients

  • 400 g de bœuf haché
  • 2 cuillères à soupe rases de nuoc mam pur (saumure de poisson – de préférence de Phu Quôc)
  • 1 cuillère à café bombée de sucre
  • ½ cuillère à café de sel fin
  • ¼ cuillère à café de poivre blanc moulu
  • 2 cuillères à soupe de fécule de pomme de terre ou de Maïzena (fécule de maïs)
  • 1 cuillère à café rase de levure chimique (type Alsa)

Matériel

  • Robot mixer
  • 1 sachet en plastique pour congélation (par exemple)
  • 1 spatule
  • 1 grande casserole
  • 1 écumoire

Préparation

  • Dans un récipient, mélanger le bœuf haché et tous les ingrédients ensemble.

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  • Dans le bol du mixer, mixer le bœuf haché assaisonné jusqu’à ce que la viande devienne plus claire.

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  • À l’aide de la spatule, racler le bol du mixer et mettre toute la pâte de viande dans un grand sachet en plastique, presser pour enlever l’air dans le sachet, tapoter la viande pour la compacter, fermer le sachet en enlevant le plus d’air.

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  • Couper le coin du sachet en plastique pour faire une sorte de poche à douille pâtissière.

Bo Vo Viên de La Kitchenette de Miss Tam 17

  • Préparer une grande assiette avec un peu d’eau dans le fond. Remplir un grand bol d’eau froide pour humidifier les mains afin que la pâte de viande ne colle pas.
  • Presser sur le sac plastique pour sortir une portion de pâte de viande. La récupérer dans la main (préalablement humidifiée à l’eau froide) et confectionner une belle boulette de la taille d’une noix. Faire de même pour le reste de viande.

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  • Faire bouillir de l’eau avec un peu de sel ou selon goût, du bouillon de bœuf pour donner encore plus de goût aux boulettes. Préparer un grand récipient d’eau froide pour plonger les boulettes après cuisson.

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  • Dès ébullition, mettre les boulettes de bœuf à cuire sur feu moyen-vif, dès qu’elles flottent, poursuivre la cuisson pendant environ 5 minutes (ou un peu plus selon la taille des boulettes). Pour savoir si c’est bien cuit uniformément, prendre une boulette et la couper en deux. Si le cœur est encore rose, pas assez cuit, poursuivre la cuisson des boulettes pendant 1 à 2 minutes supplémentaires.
  • À l’aide d’une écumoire, sortir les boulettes de l’eau (ou du bouillon) et les immerger dans le récipient d’eau froide.

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  • Ensuite, au choix : conserver les boulettes de bœuf en sachet hermétique au congélateur pour une utilisation ultérieure ou les déguster le jour même avec un bon bouillon de bœuf (type soupe phở par exemple). Elles se conservent en sachet ou boîte hermétique un ou deux jours au réfrigérateur.

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Astuces et conseils

  • N’utilisez pas d’huile mais seulement l’eau pour humidifier vos mains avant de confectionner des boulettes. Vous verrez que l’eau est suffisante pour que la viande ne colle pas à vos mains.
  • Idem pour le fond de l’assiette pour mettre votre boulettes crues. Une assiette bien humide suffit pour que les boulettes ne collent pas. Ne les faites pas se toucher entre elles, elles colleront !
  • L’aspect des boulettes n’est jamais lisse une fois qu’elles sont cuites. Vos belles boulettes lisses et crues vont devenir forcément un peu « granuleuses » d’aspect après cuisson. C’est du fait maison ! Elles ne ressemblent pas aux boulettes industrielles en paquet…
  • Pour déguster, chauffez votre bouillon de bœuf jusqu’à ébullition, plonger vos boulettes de boeuf pour les réchauffer, et servir seules en soupe ou mieux, avec des nouilles de riz, parsemez de ciboule chinoise ciselée, de coriandre ou de coriandre longue et quelques lamelles fines d’oignon. Rajoutez du piment frais en rondelles selon votre goût.

Plus besoin d’acheter des boulettes de boeuf vietnamiennes industrielles ! C’est simple et facile à confectionner, et tellement bon fait maison. Bon appétit !

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Calamars farcis à la vietnamienne (Mực nhồi thịt)

Encornets farcis photo La Kitchenette de Miss Tam 1

Au Vietnam, on trouve des calamars, encornets, seiches et poulpes à profusion et on les apprécie beaucoup en cuisine pour leur saveur et leur élasticité. Les spécimens frais sont destinés pour les grillades ou mets poêlés, fritures, soupes et pâtés (chả), et ceux qui sont séchés en usage pour les bouillons ou en apéritif.

Voici un plat vietnamien extrêmement savoureux et tout simple à faire, des calamars farcis au porc et champignons noirs (mực nhồi thịt). Habituellement réalisés avec des encornets qui sont plus longs et plus grands, grillés à la poêle et tranchés en rondelles pour piocher plus facilement avec une paire de baguettes (car traditionnellement on ne met pas de couteau à table au Vietnam), j’ai fait une adaptation sur assiette avec de petits calamars servis sans être découpés avec du riz, des tranches de concombre frais et des pickles de carottes. La farce goûteuse au porc et au calamar, parfumé aux champignons noirs, se marie parfaitement bien avec l’élasticité tendre du calamar. La sauce nuoc mam aigre-douce à l’ail et au piment relève le tout avec finesse. Un vrai régal !

Comme pour la plupart des recettes vietnamiennes, il y a autant de variantes que de familles. Tandis que les sauces varient selon goût comme la sauce aigre-douce à base de tomates, la sauce à base de sauce de soja ou encore la traditionnelle sauce nuoc mam préparée aigre-douce à l’ail et au piment, la composition principale de la farce reste plutôt constante. On y trouve toujours de la viande de porc hachée, des calamars, champignons noirs réhydratés ou champignons parfumés shiitaké, des vermicelles de soja, des oignons ou échalotes finement hachés, du sel, du poivre et du nuoc mam. Certaines familles rajoutent encore un œuf, d’autres de la farine de blé, pour agglomérer la farce. Pour varier les saveurs, on peut y mettre aussi de l’aneth ou de la ciboule.

La version que je propose avec les petits calamars demande plus de travail qu’avec les grands encornets. Mais à mon goût, c’est bien meilleur parce qu’il y a autant de calamars que de farce, tandis qu’avec les encornets, la farce est plus importante.

Voici ma recette de calamars farcis au porc et aux champignons noirs.

Pour 4 personnes. Préparation : 50 minutes.

Ingrédients :

  • Une vingtaine de petits calamars entiers (environ 8-10 cm pour la partie du corps)
  • 200 g de porc haché nature (épaule, échine ou poitrine)
  • 10 g de champignons noirs secs à réhydrater
  • 20 g de vermicelles de soja secs (ou également désignés vermicelles chinois)
  • 2 échalotes finement hachées
  • 2 gousses d’ail haché
  • 1 cuillère à soupe de nuoc mam pur (saumure d’anchois – de préférence Phu Quôc 35°)
  • 1 cuillère à café de sucre
  • 1/2 cuillère à café de sel
  • 1/2 cuillère à café de poivre moulu
  • Cure-dents pour refermer les calamars

Accompagnements :

  • 1 concombre
  • des pickles de carottes coupées en julienne ou râpées à mélanger avec 2 carottes,  2 louches de vinaigre d’alcool blanc ou vinaigre de riz, 2/3 de louche de sucre et 1 cuillère à café de sel. À faire mariner au moins 30 minutes.
  • Sauce nuoc mam préparée aigre-douce à l’ail et au piment avec 120 ml d’eau chaude, 30 ml de nuoc mam, 40 ml de jus de citron pressé, 30 g de sucre cassonade, 1 gousse d’ail pressé en purée, 1/2 piment rouge frais coupé en fines rondelles. Mélanger l’eau chaude avec le sucre pour le faire dissoudre complètement. Ajouter le nuoc mam pur et le jus de citron. Laisser tiédir avant d’ajouter l’ail et le piment. Goûter et rectifier selon goût.
  • Riz long parfumé Thaï

Préparation :

  • Faire tremper séparément les champignons noirs secs et les vermicelles de soja dans de l’eau tiède pour les réhydrater (au minimum 15 minutes). Une fois réhydratés, bien rincer et égoutter.

Champignon noir de La Kitchenette de Miss Tam

  • Découper les vermicelles de soja réhydratés en tronçons de 2 cm à l’aide d’une paire de ciseaux de cuisine (plus pratique qu’au couteau).

Vermicelles de soja photo La Kitchenette de Miss Tam

  • Enlever la partie dure (pied) du champignon noir et hacher grossièrement les champignons noirs.
  • Nettoyer et préparer les calamars en enlevant nageoire, membrane, tête et tentacules. Vider l’intérieur du corps, rincer à grande eau. Garder les tentacules pour la farce.
  • Hacher finement les tentacules et réserver.
  • Hacher les échalotes (en petits dés) et finement l’ail.
  • Dans un récipient, mélanger le porc haché nature, les tentacules de calamars hachées, les vermicelles de soja, les champignons noirs, les échalotes et l’ail.
  • Ajouter le nuoc mam pur, le sel, le sucre et le poivre moulu. Bien mélanger.

Calamars farcis photo La Kitchenette de Miss Tam 2

  • Farcir les calamars nettoyés sans tasser car le calamar va rétrécir et la farce au porc va gonfler à la cuisson. Refermer le haut du calamar à l’aide d’un cure-dent.
  • Mettre un peu d’huile et de sel dans une grande poêle et à froid, y faire cuire les calamars farcis jusqu’à ce qu’ils deviennent opaques. Puis poursuivre la cuisson à feu moyen-vif, en les retournant de temps en temps, jusqu’à ce qu’ils soient légèrement dorés.

Calamars farcis photo La Kitchenette de Miss Tam 3

  • Dans une assiette, servir l’équivalent d’un bol de riz blanc cuit, quelques rondelles de concombre frais, un peu de pickles de carottes, 5 petits calamars farcis arrosés généreusement de sauce nuoc mam à l’ail et au piment.

Encornets farcis photo La Kitchenette de Miss Tam 1

Conseils et astuces :

  • Si vous n’utilisez pas de calamars frais, vous pouvez utiliser les calamars surgelés. On n’en trouve pas d’entiers avec tête et tentacules. Dans ce cas, si vous avez en stock des seiches séchées (…sachant chasser… je plaisante) au congélateur (on en utilise pour certains bouillons au Vietnam), faites réhydrater deux petites seiches puis mixer avec la viande de porc et deux petits calamars. Ça donnera du goût à votre farce… et remplacera les tentacules.
  • Pour obtenir une belle couleur beige pour les calamars, on peut aussi ajouter un peu d’eau diluée avec une cuillère à soupe de sauce de soja et une cuillère à café de sucre pour colorer les calamars en les retournant régulièrement jusqu’à légère coloration des calamars dans la 2ème phase de cuisson sur feu moyen-vif.
  • Au Vietnam, on aime l’élasticité du calamar. On ne veut pas qu’il soit « fondant ».
  • Et si vous aimez la cuisine de la mer (et pas seulement vietnamienne), je vous conseille vivement d’aller faire un tour sur le super blog de Cuisine de la mer pour découvrir la belle plume pleine d’esprit et d’humour de Patrick, les informations très intéressantes sur tout ce qui concerne les produits de la mer en cuisine et ses très belles recettes !

Bonne découverte et bon appétit !!!

Halte gourmande : Au café Lux, un Bo Bun de rêve !

Cafe Lux Paris Bo Bun 4

Ouvert depuis le 18 septembre dans le quartier Saint-Maur / Oberkampf (Paris 11), le café Lux est un petit lieu convivial, sympa, sans chichis. Tenus par la belle et lumineuse Sophie (d’origine vietnamienne) et son mari Nicolas, ils misent sur la qualité, la simplicité et l’ambiance familiale. Les produits sont frais du jour, les vins naturels directement négociés avec les producteurs, les alcools sélectionnés pour les dégustations à sec, et pour passer du coq à l’âne, un flipper trône au fond de la salle pour se détendre si on en a envie car nos maîtres des lieux participent depuis quelques années aux championnats de France de flipper en famille, fiston inclus.

Cafe Le Lux Bo Bun Paris 11

Nicolas du Café Lux, Paris.

Nicolas du Café Lux, Paris.

Sophie du Café Lux, Paris.

Sophie du Café Lux, Paris.

Au café Lux, on y sert le petit-déjeuner, le goûter avec des gaufres maison et gâteau du jour et on termine la journée avec l’apéro. Pas de restauration… sauf le midi ! Le concept est simple, un plat unique à midi : le Bò Bún vietnamien ! Sur place ou à emporter. La maison table sur la qualité, le frais du jour, le fait maison, « quand il n’y en a plus, il n’y en a plus ! ». On repart parfois bredouille mais on revient vite le lendemain pour s’en commander un ! Les nouveaux habitués du lieu le savent bien.

Cafe Lux Paris Bo Bun

Cafe Lux Paris Bo Bun 13Alors, qu’est-ce que le bò bún de Lux a de si particulier ?

C’est un bò bún trois étoiles préparé avec amour, magnifiquement présenté, une vraie symphonie de saveurs et de textures. Si on retrouve bien tous les ingrédients d’un bo bun servi à Paris (bœuf sauté à la citronnelle, concombre frais, pickles de carottes, pousses de soja, herbes aromatiques, oignons frits maison, cacahuètes grillées concassées, chả giò), la signature de Sophie est l’emploi des pétales de riz de forme triangulaire (« rice flakes ») qui change agréablement la texture en bouche mais aussi le goût des bo bun habituellement servis avec des vermicelles de riz fins. Voilà une idée formidable à déposer très vite avant que l’on la lui pique ! Et la touche finale fondamentale qui harmonise et équilibre le tout : la superbe sauce nuoc mam aigre-douce à l’ail et au piment dont Sophie garde jalousement le secret, élaborée depuis vingt ans à partir de la recette de sa grand-mère et de sa mère, nous dit-elle.

Cafe Lux Paris Bo Bun 16« Bon appétit ! Aidez-vous de la cuillère pour bien mélanger tous les ingrédients avant de déguster ! La sauce se retrouve toujours au fond du bol. Remuez, mélangez régulièrement pour apprécier votre bo bun. » nous recommande Nicolas au moment de servir.

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Mmm… Chaque bouchée est un vrai voyage gustatif. Je suis transportée… Un vrai délice !

Vous l’avez compris, et ça n’engage que moi, le Bo Bun de Lux est un sacré coup de cœur ! Je vous invite chaleureusement à y faire un tour à midi, du mardi au samedi, à partir de 12h30. Mais n’oubliez pas, ici, pas de réservation, c’est au p’tit bonheur la chance ! « Quand il n’y en a plus, il n’y en a plus! » Un gage de fraîcheur.

Si vous y allez, faites-leur un coucou de ma part ! Bonne découverte !

Café Lux

122 rue Saint-Maur 75011 Paris

Du mardi au vendredi de 8h à 21h. Samedi de 8h à minuit. Service Bo Bun pour le déjeuner ou à emporter à partir de 12h30 jusqu’à ce qu’il n’y en ait plus… Dimanche et lundi : fermé.

Métro : Couronnes (ligne 2), Parmentier (ligne 3) ou Saint-Ambroise (ligne 9)

Email : le.lux.cafe @ gmail.com

Cafe Lux Paris photo La Kitchenette de Miss Tâm

Banh khot de Vũng Tàu (palets de riz aux crevettes)

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Connaissez-vous les bánh khọt ? Ce sont de délicieux petits palets plats et épais à base de riz, agrémentés d’une crevette et parsemés de ciboule à l’huile (mỡ hành). Mon cher grand-père paternel, fin gourmet et éminent gastronome, qui vit à Saigon, en raffole et m’a fait découvrir ce merveilleux plat.

Jaunes ou blancs, les banh khot sont principalement déclinés en deux variantes : les banh khot jaunes du Delta du Mékong (Miền Tây) et les banh khot blancs de la ville de Vũng Tàu (sud-est du pays, anciennement Cap St Jacques). Ils sont cuits dans des moules alvéolés à fond plat ou légèrement incurvé, posés sur feu de bois ou au charbon. Croustillants dehors et moelleux au cœur, ils se dégustent chaud immédiatement après confection, enveloppés dans une feuilles de salade ou de moutarde (cải bẹ xanh), avec quelques herbes aromatiques (houttuynia cordata ou fish mint (orthographié diếp cá, dấp ou giấp cá), basilic thaï, pérille (tía tô), menthe…), de légumes aigres-doux comme de tradition, la papaye verte râpée ou les tiges de lotus (ou encore la mangue verte, le radis blanc suivant les localités) et de sauce nuoc mam aigre-douce à l’ail et au piment. Dans la version du Delta, on nappe parfois de lait de coco.

Banh khot Vung Tàu dégustés à Saigon.

Banh khot Vung Tàu dégustés à Saigon.

D’où viennent les bánh khọt ? Les banh khot seraient originaires de la Côte centrale du sud (Nam Trung Bộ de Bình Thuận à Đà Nẵng) issus du Banh Căn, un mets assez proche par l’aspect mais différent par la façon de déguster, les accompagnements et la sauce. Une vague de population de la Côte centrale du sud immigra dans le sud pour s’installer sur le nouveau territoire à partir du milieu du XVIIIe siècle, apportant leur savoir-faire culinaire dont le bánh căn, puis en le réadaptant peu à peu au goût du Sud. Le nom donné « bánh khọt » est assez flou et sans certitude sur son origine. Deux hypothèses possibles : l’une dit que cela viendrait de l’onomatopée « khot khot » (le KH se prononce comme la Jota espagnole), rappelant le son causé par la cuillère au moment de racler pour retirer les banh khot du moule; l’autre hypothèse dit qu’il s’agirait d’une déformation du mot « khộp » (terme ancien inusité) qui signifiait misère car les gens à l’époque étaient si pauvres qu’ils ne pouvaient manger que des galettes sans rien. Une déformation du mot dans la prononciation se serait transformée en « khọt » à l’usage. Source : site officiel de Bà Rịa – Vũng Tàu.

Banh khot Miên Tây de La Kitchenette de Miss Tâm 1

Les banh khot du Delta du Mékong ont une très belle couleur jaune due au curcuma, piqués de vert grâce aux oignons verts ou à la ciboule, avec une jolie touche rose ou rouge orangé de la crevette. On ajoute toujours un peu de haricots mungo décortiqués déjà cuits et parfois un peu de viande de porc haché. La pâte est réalisée à base de farine de riz, de riz cuit selon certaines recettes, de lait de coco, d’un peu de curcuma (pour la couleur jaune), des œufs et des oignons verts ou ciboule hachée ajoutée directement dans la pâte. Tous ces ingrédients rappellent beaucoup ceux des Bánh xèo (crêpe vietnamienne). C’est la version la plus courante utilisée à l’étranger, pour son aspect coloré plus attrayant et alléchant que la version plus simple de la ville de Vũng Tàu.

Copyright photo Châu H. Anh sur le site de Tim Quan Ngon.

Copyright photo Châu H. Anh sur le site de Tim Quan Ngon.

Pourtant, les banh khot de Vung Tàu sont particulièrement réputés. Les petits palets blancs à la croûte dorée sont surmontés d’une belle crevette rose, le tout parsemé de poudre de crevettes grillées et de ciboule ciselée à l’huile. Malgré une apparence plus simple, la texture des palets est plus légère et croustillante à l’extérieur car moins riche en lait de coco ou en œufs, le cœur bien moelleux révèle une crevette ferme et juteuse, délicatement parfumé à la ciboule et aux crevettes grillées. La pâte est exclusivement à base de farine fraîche de riz et ne contient ni de ciboule / oignons verts (et parfois) ni d’œufs. À l’instar des banh khot de la région de miên Tây, ils sont accompagnés de feuilles de salade, de feuilles de moutarde, de diverses herbes aromatiques et de papaye verte râpé en longs filaments ou de tiges de lotus vinaigrées. Sans oublier la sauce nuoc mam aigre-douce à l’ail et au piment, la touche finale qui révèlera toutes les saveurs de ces palets exquis. Pas étonnant que depuis 2011, ils ont été sélectionnés parmi les douze meilleurs plats du Vietnam dans les cuisines d’Asie.

Si à l’origine les banh khot se dégustaient au petit-déjeuner, aujourd’hui on peut en consommer à toute heure de la journée, en entrée comme en plat de résistance. Bien que cela soit un mets simple et populaire, les banh khot de Vũng Tàu trouvent place aussi bien dans les petites gargotes spécialisées que dans les restaurants ou les grands hôtels de la ville, servis dans les assiettes par dizaine avec à disposition de la salade, des feuilles de moutarde, de la papaye ou des tiges de lotus aigres-douces, des herbes aromatiques à profusion et l’incontournable sauce nuoc mam aigre-douce. Malgré leur petite taille, les banh khot calent très vite. Mais pêchant par gourmandise, une dizaine de banh khot peut rapidement se transformer en vingtaine…dans l’estomac. On y est vite sans s’en rendre compte ! Parmi les lieux incontournables et les plus réputés de Banh Khot à Vũng Tàu, citons entre autres le Bánh Khọt Gốc Vú Sữa (photos) situé au 14 Nguyễn Trường Tộ. Le succès du lieu et les longues files d’attente à certaines heures de pointe, justifient la présence de dizaine de cuisinières confectionnant des centaines de banh khot avec rapidité et dextérité devant les clients (photos ci-dessous). Un gage de fraîcheur assuré !

Banh khot Quan Gôc Vu Sua 3 photo La Kitchenette de Miss Tam

Banh khot Quan Gôc Vu Sua 2 photo La Kitchenette de Miss Tam

Confectionner des banh khot hors du Vietnam n’est pas chose aisée. On ne retrouve pas complètement la texture à la fois bien croustillante à l’extérieur et tendre à l’intérieur, sans doute à cause de la différence de farine de riz et du mode de cuisson. Les moules à banh khot sont quasiment introuvables ici. En remplacement, on peut utiliser les poêles à takoyaki japonais, contenant des alvéoles de 5 cm de diamètre mais trop profondes ou les poêles à poffertjes hollandais contenant des alvéoles peu profondes. Si vous utilisez la poêle à takoyaki, ne faites pas l’erreur (comme on voit ici en France) de trop remplir les alvéoles de pâtes, car vous obtiendrez des pseudo banh khot semi-sphériques, pas très jolis, trop épais et bourratifs !

Banh khot de La Kitchenette de Miss Tâm poele takoyaki

La farine de riz au Vietnam est souvent faite sur place par les cuisinières elles-mêmes. Les grains de riz sont trempés une nuit, réduits en poudre à la meule le lendemain. Elles laissent encore reposer la farine obtenue pour la laisser sécher un peu avant de l’utiliser. Les textures obtenues sont variables en fonction de la qualité et de la variété du riz. Toutes sont unanimes à ce sujet : le croustillant vient de la qualité de la farine de riz faite maison et de son mélange de la pâte.

Hors du pays, impossible de fabriquer sa propre farine. Par commodité, on trouve des préparations industrielles toutes prêtes pour banh khot, avec farine de riz, farine de blé ( ! ), poudre de bouillon et exhausteur de goût ou glutamate. À cela, on rajoute curcuma, œufs, lait de coco, etc. J’avoue n’avoir jamais testé cette préparation industrielle. Étant donné que la majorité des recettes l’utilise, je pense qu’elle doit être très bonne. Cependant je préfère utiliser directement de la farine de riz (on en trouve facilement dans les magasins d’alimentation asiatique) et du riz cuit mixé, faire ma préparation, savoir ce que j’y mets et avoir la surprise de délicieux banh khot sensiblement différents d’une fois à l’autre.

Après de longues recherches sur les sites vietnamiens, où quelques recettes de banh khot (les mêmes repiquées d’un site à l’autre) véhiculent invariablement, je n’ai rien trouvé d’inspirant, ni même du côté des Vietnamiens anglophones et francophones où les recettes utilisent majoritairement la préparation de farine industrielle de banh khot, avec un dosage assez lourd en lait de coco (trop gras et écœurant), de curcuma et trop d’œufs. Impossible également d’obtenir le secret de la pâte à banh khot chez les professionnel(le)s… Mais à partir de témoignages d’amateurs éclairés et de visionnage de documentaires en vietnamien sur le sujet, sans jamais obtenir de proportions claires ou exactes des ingrédients (secret gardé ou cuisine à l’instinct), j’ai alors élaboré la recette de banh khot avec mes propres proportions. Ma préférence allant pour les banh khot blancs de Vung Tàu (plus légers et croustillants) à ceux jaunes de la région de miên Tây, voici ma recette de bánh khọt dans le style de Vũng Tàu.

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Pour 35 à 40 petits banh khot de 5 cm de diamètre. Temps de préparation en deux temps : la veille et le jour même. La veille : Temps de trempage des crevettes : 1 h. Temps de cuisson du riz : 20 minutes. Temps de préparation de légumes aigres-doux (suivant le légume choisi !) : 30 minutes.  Le jour J : Préparation : 45 minutes. Cuisson : 7 à 10 minutes par poêlée.

Matériel :

  • Poêle à takoyaki japonais ou à poffertjes hollandais
  • Un couvercle (bombé) de la taille du diamètre du moule pour couvrir (indispensable!)
  • Mixeur blender
  • Récipient avec bec verseur

Ingrédients :

Pâte à banh khot blanc (dans le style de Vung Tàu) :

  • 150 g de farine de riz
  • 100 g de riz long Thaï déjà cuit
  • 270 à 300 ml d’eau
  • 75 ml de lait de coco
  • Facultatif : 1/2 œuf légèrement battu (sans œuf, la croûte est plus croustillante mais la pâte doit être « excellente »)
  • 1/2 cuillère à café de sel fin
  • 1 cuillère à café de sucre en poudre
  • Huile végétale neutre pour huiler le moule (ou du saindoux)

Farce :

  • 35 à 40 crevettes crues sans têtes et décortiquées, de taille moyenne
  • 50 g de crevettes séchées
  • 3 ou 4 tiges d’oignons verts ou de ciboule chinoise (partie verte) ciselées
  • Huile végétale neutre + 1 pincée de sel
  • Facultatif : Huile d’annatto (à confectionner soi-même)
  • 1 cuillère à café de nuoc mam pur (saumure de poisson pure)
  • 1 cuillère à café de sucre en poudre

Sauce d’accompagnement : Nuoc mam aigre-doux à l’ail et au piment

  • 2 cuillères à soupe de nuoc mam pur (idéalement de Phu Quôc)
  • 2 cuillères à soupe de jus de citron vert pressé
  • 1 cuillère à soupe de vinaigre de riz
  • 3 cuillères à soupe rase de sucre en poudre
  • 8 à 9 cuillères à soupe d’eau
  • 1 piment frais + 1 gousse d’ail finement haché

Accompagnement :

Herbes aromatiques Vietnam photo La Kitchenette de Miss Tam

  • Feuilles de salade (batavia, laitue…)
  • Facultatif : feuilles de moutarde (on peut en trouver dans les grands magasins d’alimentation asiatique à Paris)
  • Variété d’herbes aromatiques : fish minht (dấp, diếp cá), basilic thaï (rau quế), pérille (shiso / tía tô), menthe
  • Légumes aigres-doux râpés en longs filaments (préparation des légumes avant marinade ici : papaye verte, tiges de lotus). Si on n’en trouve pas, remplacer par le radis blanc (daikon) et/ou les carottes. Recette de légumes aigres-doux ici.

Préparation :

La veille :

  • Cuire le riz long Thaï et réserver au frais 100 g pour la préparation de la pâte le lendemain.
  • Tremper les crevettes séchées dans l’eau tiède pendant 1 heure. Rincer, égoutter, mixer finement les crevettes. Dans une poêle, faire griller à sec pendant une dizaine de minutes à feu moyen. Verser 1 cuillère à café de nuoc mam pur et 1 cuillère à café de sucre sur les miettes de crevettes grillées. Mélanger et continuer à faire griller à la poêle jusqu’à ce que la poudre soit sèche et se détache (environ 5 minutes). Si on a de l’huile d’annatto (ici), verser une cuillère à café pour colorer la poudre de crevette (facultatif). Réserver dans un pot.
  • Faire les légumes aigres-doux : ici.

Banh khot de La Kitchenette de Miss Tâm crevettes poudre 2

Le jour J :

Accompagnement :

  • Laver la salade, les feuilles de moutarde (s’il y en a) et les herbes aromatiques. Nettoyer et bien essorer. Garnir un grand plat ou assiette pour les mettre à disposition aux convives.
  • Dans une assiette ou un bol, déposer les légumes aigres-doux.

Sauce d’accompagnement :

  • Laver le piment et couper en fines rondelles. Hacher la gousse d’ail.
  • Presser le citron vert. Réserver 2 cuillères à soupe de jus pressé.
  • Dans une casserole, sur feu doux, dissoudre le sucre en poudre dans l’eau et le nuoc mam pur. Éteindre.
  • Verser le tout dans un grand bol. Ajouter le jus de citron vert pressé et le vinaigre de riz. Mélanger. Puis ajouter l’ail haché et le piment.
  • Goûter et rectifier l’assaisonnement si nécessaire : trouver l’équilibre entre le sucré-salé-acidulé.

Pâte à banh khot :

Banh khot de La Kitchenette de Miss Tâm Farine riz

  • Dans un blender (mixeur pour réduire en purée et en liquide), mixer les 100 g de riz blanc cuit avec 150 ml d’eau, 75 ml de lait de coco, sel et sucre. Réserver.
  • Mélanger dans un récipient (idéalement, avec bec verseur pour faciliter le remplissage des alvéoles du moule), la farine de riz avec 150 ml d’eau tiède versée par petites quantités. Verser le mélange riz cuit / lait de coco dans la préparation de farine de riz et bien mélanger. La pâte d’aspect un peu granuleuse (à cause du riz cuit) doit être assez épaisse et fluide comme celle des pancakes.
  • Laisser reposer la pâte pendant la préparation de la farce.

Farce :

Crevettes photo La Kitchenette de Miss Tâm

  • Laver les crevettes avec un peu d’eau salée, rincer puis décortiquer les crevettes crues. Supprimer les têtes si elles sont entières. Réserver.

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  • Ciboule à l’huile (mỡ hành) : Laver les tiges d’oignons verts ou ciboule chinoise, n’utiliser que la partie verte. Réserver la partie blanche pour une autre préparation de plat (ça se conserve dans une boîte hermétique au frais pendant 1 jour ou deux). Ciseler assez finement la partie verte de l’oignon vert ou la ciboule. Mettre dans un bol avec une bonne pincée de sel. Faire chauffer 6 à 8 cuillères à soupe d’huile végétale neutre (tournesol, arachide par ex) dans une petite casserole. Dès qu’elle est bien chaude (jeter une goutte d’eau, si ça grésille, éteindre), la verser brûlante sur la ciboule ciselée. Ca doit grésiller ! Mélanger et réserver.

Réalisation des banh khot :

  • Faire chauffer sur feu moyen le moule à takoyaki japonais après avoir mis un peu d’huile ou du saindoux (gras de porc) dans chaque alvéole.
  • Lorsque c’est chaud, verser un peu de pâte (après l’avoir bien mélangée à nouveau) dans chaque alvéole du moule, à la moitié ou au 3/4 de sa profondeur, afin de ne pas avoir des banh khot trop épais.

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  • Ajouter aussitôt une petite crevette crue sur la pâte liquide dans chaque alvéole. Couvrir et laisser cuire 7 à 10 minutes selon le diamètre des alvéoles.
  • C’est cuit et prêt quand le fond est doré, croustillant et le coeur de la pâte est cuit et tendre. À l’aide d’une cuillère, sortir les banh khot des alvéoles et les disposer dans une assiette. Faire de même avec le reste de pâte à banh khot et les crevettes crues.

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Photo : ici, mes crevettes sont légèrement trop grosses pour ce plat. Choisissez des plus petites.

  • Verser un peu de ciboule à l’huile et de poudre de crevettes séchées sur chaque banh khot. Servir chaud immédiatement.

Conseils :

Si vous laissez les banh khot un moment, ils vont se ramollir. C’est normal. On peut éventuellement les réchauffer au four pour retrouver un peu de croustillant, mais le coeur des banh khot séchera un peu. Ça ne sera plus aussi bon. Veillez à ce que les accompagnements et la sauce soient prêts sur la table. Faites les banh khot au dernier moment, avant de servir pour savourer et apprécier pleinement vos banh khot dans les règles de l’art !

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Comment déguster les banh khot comme au Vietnam :

À la main. Prenez une feuille de salade, une feuille de moutarde (s’il y en a), déposer quelques légumes aigres-doux, quelques feuilles d’herbes aromatiques et un banh khot. Enveloppez soigneusement le tout (avec délicatesse et dextérité…) sans rien laisser tomber de côté, trempez le tout dans la sauce nuoc mam aigre-douce à l’ail et au piment servie dans un bol pour chaque convive. Dégustez et savourez ! Bonne dégustation !!!

Copyright photo Châu H. Anh / Banh Khot, à Vung Tàu sur le site de Tim Quan Ngon.

Copyright photo Châu H. Anh / Banh Khot, à Vung Tàu sur le site de Tim Quan Ngon.