Poisson au gingembre à la vapeur (cá hấp hành gừng)

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Voici une recette inspirée du fameux poisson au gingembre à la vapeur de la cuisine cantonaise qui est particulièrement appréciée par les Vietnamiens. Après avoir lu l’exquise recette publiée par Le gastronome parisien (ici), j’ai eu envie de proposer une version vietnamienne à base de sauce nuoc mam préparée au gingembre (nước mắm gừng) à la place de la sauce de soja.

Au Vietnam, on prépare habituellement ce poisson au gingembre à la vapeur comme dans sa version d’origine, avec la sauce de soja. Et pourtant, la sauce nuoc mam au gingembre est absolument parfaite pour ce type de poisson cuit à la vapeur. Les Vietnamiens préfèrent plutôt employer cette sauce au gingembre pour le poisson frit, mais également pour les escargots farcies, le calamar ou encore les volailles comme le canard ou le poulet bouilli ou cuit à la vapeur.

Excepté le riz gluant, les haricots mungo ou certains mets aux feuilles de bananier cuits à la vapeur comme dans tout le sud-est asiatique, on notera que le mode de cuisson à la vapeur dans la cuisine vietnamienne concerne souvent des plats d’influence chinoise tels que le poisson au gingembre à la vapeur, le poulet à la vapeur, les brioches à la vapeur bánh bao… Les plats typiques vietnamiens sont plutôt des grillades au charbon, des cuissons au bouillon ou à l’eau, des ingrédients rapidement poêlés ou des plats mijotés.

La richesse de la cuisine est de tirer profit des influences diverses pour re-créer des plats selon son goût, ses envies, ses humeurs. Adepte de la cuisson à la vapeur et pour varier les plaisirs, j’ai ainsi combiné ce fameux poisson au gingembre cantonais à la mode vietnamienne, dont la sauce nuoc mam au gingembre et au piment relève et parfume délicieusement la chair douce du bar. La touche de shiitaké n’est pas indispensable, mais il serait dommage de s’en passer car le poisson s’imprègne délicatement de son parfum durant la cuisson.

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Voici ma version de la recette de poisson vapeur au gingembre (cá hấp hành gừng):

Pour 2 personnes. Préparation : 30 minutes. Cuisson (selon cuit-vapeur électrique ou sur feu) : entre 15 et 25 minutes.

Ingrédients :

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  • Un poisson (bar, daurade…) entier, écaillé, vidé de 500-600 g
  • Un morceau de gingembre (gros comme deux doigts) coupé en julienne
  • Une échalote finement ciselée
  • 2 gousses d’ail pressé
  • 3 tiges de ciboules (ou cives ou oignons verts) en julienne (ou une variante avec 1/3 botte de ciboulette aillée à feuilles plates)
  • 1 piment rouge (facultatif) égrené, coupé en julienne
  • Facultatif : 5 ou 6 têtes de shiitakés déshydratés (champignons parfumés)
  • sel

Sauce de nuoc mam au gingembre (1 bol)

  • 3 cuillères à soupe de nuoc mam pur (saumure de poisson non préparée)
  • 3 cuillères à soupe de jus de citron vert pressé (soit environ 1 citron vert et 1/2)
  • 2 cuillères à soupe rase de sucre en poudre
  • 2 cuillères à soupe d’eau chaude
  • 1 cuillère à soupe de gingembre haché
  • Piment rouge (facultatif / selon goût)

Préparation :

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  • Laver, tremper les têtes de shiitaké séchés dans un grand bol d’eau pendant 30 minutes. Une fois réhydratés, les réserver.
  • Laver les tiges de ciboules, cives ou tiges d’oignons verts. Trancher les tiges de la longueur d’un doigt, les ciseler finement en julienne et les faire tremper dans l’eau froide pour les boucler.

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  • Laver, peler, ciseler l’échalote, le piment, le gingembre.
  • Hacher ou presser les gousses d’ail.
  • Laver, sécher le poisson. Entailler le poisson des deux côtés. À la main, saler le poisson et dans les entailles.
  • Dans un cuit-vapeur, soit dans un plat de la taille du poisson pouvant aller dans le cuit-vapeur, soit sur une feuille de papier sulfurisé, déposer les shiitaké réhydratés, puis le poisson par-dessus. Farcir le ventre du poisson avec l’échalote ciselée, un peu d’ail et de gingembre pour le parfumer durant la cuisson. Cuire durant 15 minutes. Si votre cuit-vapeur est de faible puissance, il faudra prolonger le temps de cuisson.

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  • À 5 minutes avant la fin de cuisson, parsemer de gingembre en julienne sur le poisson. Recouvrir et poursuivre la cuisson à la vapeur.
  • Durant ce temps, préparer la sauce. Piler le gingembre haché au mortier avec l’ail, puis le piment (facultatif). Ajouter le sucre. Piler jusqu’à dissolution du sucre.

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  • Presser les citrons verts.
  • Dans un bol, verser 2 cuillères à soupe d’eau, 3 cuillères à soupe de nuoc mam pur (saumure de poisson) et 3 cuillères à soupe de  jus de citron vert pressé. Mélanger. Ajouter le mélange gingembre-ail-piment-sucre. Mélanger. Goûter et rectifier. La sauce doit être assez salée, légèrement sucré-acide, bien parfumée au gingembre et assez pimentée (facultatif). Réserver.

Nuoc mam gung de La Kitchenette de Miss Tam

  • Après cuisson du poisson, parsemer de ciboules, cives ou oignons verts pré-trempés dans l’eau, puis de fines lamelles de piments. Retirer les shiitaké qui sont présents seulement pour parfumer le poisson. Les réserver pour une soupe en accompagnement par exemple. Les shiitaké trop parfumés risquent de nuire la saveur du gingembre.

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  • Avant de servir, arroser généreusement de sauce nuoc mam au gingembre. À déguster avec du riz long blanc nature.

Très bonne dégustation !

Poisson vapeur gingembre La Kitchenette de Miss Tâm

Soupe aigre-douce au poisson (canh chua cá)

Connaissez-vous le plaisir de cuisiner avec son père ? Quand l’occasion se présente, je savoure chaque minute qui passe. Et quand il s’agit en plus d’une de mes soupes préférées, le plaisir en est décuplé. Une fois n’est pas coutume, voici une recette vietnamienne à 4 mains : la soupe aigre-douce au tamarin et au poisson ou canh chua cá.

Traditionnellement, la cuisine vietnamienne se transmet de mère en fille, ou en famille entre femmes. Point de livres, ni d’écoles de cuisine, la cuisine vietnamienne se transmet oralement, par l’observation et par la pratique. Si des écoles de cuisine vietnamienne fleurissent aujourd’hui au Vietnam, c’est principalement destiné aux touristes. On s’adapte à la mode. Lorsqu’un(e) Vietnamien(ne) vous dit ne pas savoir cuisiner, il ou elle sait en réalité toujours cuisiner quelques plats familiaux. Prenez deux ou trois Vietnamiens ou Vietnamiennes, mettez-les ensemble, immanquablement la discussion tournera autour de la nourriture, des meilleurs plats, des recettes de famille et même de la façon de les cuisiner. C’est montrer tout l’amour et l’importance que portent les Vietnamiens à la cuisine ! Je parle de mon peuple, mais il pourrait s’agir d’autres pays asiatiques, j’en suis sûre. Mais je m’égare.

Excepté les professionnels, les hommes au Vietnam ne cuisinent pas. Ils aident éventuellement en cuisine lors des grands repas de fête comme la confection des gâteaux de riz gluant du nouvel an (banh chung, banh tet). Pour la cuisine du quotidien, ce sont bien les femmes qui s’en chargent. Mais les Vietnamiens exilés depuis les années quarante / cinquante et ceux qui ont dû quitter le pays dans les années soixante-dix et quatre-vingts, ces hommes se sont mis à cuisiner, pour retrouver le goût du Vietnam, le réconfort affectif et gustatif, et en vieillissant, le besoin d’effectuer un retour aux sources.

À l’étranger, une profonde mutation dans la mentalité des Vietnamiens s’est opérée. Les hommes vietnamiens aiment et se mettent à cuisiner. La cuisine du Vietnam est un patrimoine qui leur est cher ! Sans doute qu’à travers cette cuisine, l’amour maternel et la voix de la patrie résonnent aussi dans leur cœur. Elle évoque la joie des réunions familiales ou amicales autour d’une table, le lien fraternel qui les relie entre compatriotes exilés, rappelle une histoire et une culture communes, et son identité en ces terres d’accueil. Faire la cuisine est un acte d’amour, de plaisir mais aussi de résistance !

Mon père fait partie de ces Vietnamiens venus en France pour étudier au début des années soixante. Il a fallu qu’il se mette à la cuisine pour satisfaire ses envies de plats vietnamiens, soigner son mal du pays et préserver aussi sa culture. C’est ainsi qu’il a cuisiné en reproduisant les plats de mémoire gustative ou en mémorisant ce qu’il dégustait en famille, chez des amis vietnamiens, dans les restaurants du monde entier qui servent des plats vietnamiens car il voyage tout le temps, pour les besoins de sa profession. Mon père aime réellement cuisiner même si sa façon de faire est un tantinet loufoque. C’est un improvisateur né. Rien ne peut se faire conventionnellement. Mais le résultat est vraiment bluffant, je dois l’avouer. Le seul défaut chez lui : sa tendance à faire des quantités pour un régiment ! Une petite soupe ou un petit ragoût pour quatre devient LE plat pour le mois. À force de rajouter ceci ou cela, la casserole devient une grosse marmite. Et ça, ça n’a pas changé depuis mon enfance…


Mon cher père… 70 ans ! Quel est son secret de jouvence ?

Il y a quelques semaines, mon père m’a offert un des plus beaux cadeaux : faire la cuisine à quatre mains. Il sait que la soupe aigre-douce au poisson est une de mes préférées. C’est aussi celle qu’il réalise à la perfection. Je rêvais depuis longtemps qu’il me révèle son secret de fabrication. Cette soupe populaire toute simple s’entoure pourtant de magie avec lui. Je ne me souviens que de gestes, de bruits d’aspiration de soupe lorsqu’il goûtait pour rectifier l’assaisonnement, des grognements de satisfaction et du capharnaüm qui régnait dans la cuisine ! Aujourd’hui, c’est toujours la même chose, sans le désordre car c’est chez moi. La kitchenette est trop petite. Il faut bien s’organiser et je suis là pour ça pendant que mon père s’agite bien sûr aux fourneaux. Bien que je sache bien faire cette soupe, mon père me donne ses instructions pour préparer les ingrédients. Rien de difficile, il faut simplement tout laver, sécher, couper. Pendant ce temps, il fait sa soupe. Je lui demande les quantités, il n’en a aucune idée. Voilà à peu près un raccourci de nos échanges durant la réalisation de la soupe… Tout cela en vietnamien mais traduit ici en français !

Mon père : – « Oh c’est simple, normalement tu fais revenir un peu d’ail et d’oignon avec les morceaux de tomates, tu mets les darnes, tête et queue de poisson que tu fais revenir, tu mets de l’eau à la moitié de la casserole (c’est une grosse marmite!), tu ajoutes les morceaux d’ananas et le jus de tamarin, tu assaisonnes d’un peu de sucre et de nuoc mam. Quand ça bout, tu rajoutes les gombos et les tiges de taro. Tu goûtes. Tu rectifies. Mais aujourd’hui, on fait avec l’aile de raie, alors tu ne fais pas revenir la raie avant. Tu rajoutes seulement après la première ébullition de l’eau.

Moi : – Euh d’accord… mais tu mets combien de poisson pour quelle quantité d’eau pour le bouillon? Quelles sont les quantités des ingrédients de cette soupe ?

Mon père : – Je n’en sais rien. Je fais à l’instinct. Tu regardes, tu évalues, tu goûtes. C’est simple !

Moi – perplexe : – OK ça ne m’aide pas trop, mon cher Père… Eh es-tu sûr de vouloir mettre autant de tomates (il doit y en avoir 5 ou 6) ??? Ce n’est pas juste une ou deux ?

Mon père : – Oh c’est comme tu veux. Moi j’aime quand c’est coloré. Elles donnent du goût et de l’acidité. Alors que l’ananas va donner du sucré à la soupe. Il faut que tu coupes tes tomates en gros morceaux de biais. C’est plus joli. (finalement il coupe les tomates)

Moi : – Mmm… ça ne me fait pas avancer d’un iota ton histoire. Et dis donc, stop, stop ! Qu’est-ce que tu as mis dans le bouillon pendant que je découpais l’ananas ?

Mon père : Du jus de tamarin qu’on vient de filtrer, du sucre et du nuoc mam pur.

Moi : – OK mais tu vas trop vite. Combien de nuoc mam, combien de sucre ?

Mon père : – Mmm (il réfléchit), eh bien tu mets un peu de sucre et un peu de nuoc mam.

Moi (désespérée) : – On ne va pas aller loin comme ça Papa. Un peu… ? C’est combien ? Une, deux, trois cuillères à soupe ?

Mon père : – Je ne sais pas. Je n’ai pas mesuré. J’ai versé, mélangé, goûté, rectifié et voilà. Facile, non ? Il faut simplement goûter. Après ébullition, j’ai mis les autres légumes, hein, tu n’oublies pas. Les germes de haricots mungo puis les herbes aromatiques en dernier ! Et la touche finale, tu dois mettre un peu d’ail frit et le piment, OK ?

Moi (dubitative sur la quantité de sucre car mon père a semblé vider la boîte!) : – Comment veux-tu que je partage ta recette avec mes lecteurs ?

Mon père : – Comment, tu n’as rien retenu de ma leçon de cuisine ?

Moi : – Euh… si, si (éclats de rire). C’était parfaitement (pas) limpide ! Reçu 5/5. Merci Papa ! On goûte ? Mmmh… quelle merveille !!! Le goût de l’enfance… Tu es fantastique !

Mon père : – Maintenant on met les ailes de raie cuite dans une assiette avec une ou deux cuillères à soupe de nuoc mam pur. On pioche quelques morceaux de raie pour déguster avec le bol de riz rempli de soupe aigre-douce et de légumes… Alors, c’est bon ?

Moi : Oh la la, c’est divin ! La raie est bien tendre et se marie parfaitement avec le nuoc mam pur. L’acidité du tamarin se rééquilibre avec la douceur de l’ananas. La richesse des saveurs du bouillon, des herbes, de l’ail frit et le mélange étonnant des textures des légumes sont vraiment superbes. Merci Papa ! On va tous se régaler ! »

Voici maintenant ma recette de la soupe aigre-douce au poisson (canh chua cá) :

Pour 4 – 6 personnes. Préparation : 40 minutes. Cuisson : 30 minutes.

Ingrédients :

  • 600 g de poisson de type mulet ou merlu. On peut aussi utiliser l’aile de raie (cá đuối) dans ce cas, comptez deux ailes de raies pour 4, le pangasius frais ou surgelé (cá tra) ou le fameux poisson à tête-de-serpent (cá lóc).
  • 1,5 litre d’eau bouillante
  • 1/4 d’ananas ou un 1/2 petit ananas
  • 2 ou 3 tomates
  • 12-15 gombos (đậu bắp)
  • 2 tiges de taro (bạc hà)
  • 150 g de germes de haricots mungo
  • 1 gousse d’ail
  • 1 gros oignon
  • 3 gousses d’ail frit
  • 8 tiges d’herbes à paddy (rau mò om) ou s’il n’y en a pas, du basilic thaï
  • 6 à 8 feuilles de coriandre longue ou épineuse (ngò gai) ou s’il n’y en a pas, quelques brins de coriandre (persil chinois)
  • Facultatif : Piment rouge frais, épépiné, ciselé en fines rondelles.
  • 100 g de pâte de tamarin séché à réhydrater dans l’eau bouillante et à filtrer (si vous n’en trouvez pas, on peut remplacer par 2 ou 3 cuillères à soupe de jus de citron ou du vinaigre de riz comme mon père le fait souvent aussi).
  • 3 cuillères de nuoc mam non dilué (saumure de poisson – préférez la marque Phu Quôc)
  • 1 cuillère à soupe de sucre (ou plus si vous aimez sucré – attention, goûtez seulement après avoir mis l’ananas qui va déjà sucrer la soupe!)
  • 1 cuillère à café de sel

Herbe à paddy (plante aquatique poussant dans les champs de riz inondés)
En vietnamien, il existe plusieurs appellations : Ngò Om, Ngò Ôm, Ngổ (Nord) / Rau Om, Rau Mò Om, Rau Ôm (Sud) / Ngổ Hương, Ngổ thơm, Ngổ Om (Centre).
Goût citronné – Parfum anisé.

Préparation :

  • Dans un bol, faire tremper 100 g de pâte de tamarin séché recouverte d’eau bouillante pendant la préparation de la soupe. Au bout de trente minutes, écraser le tamarin dans l’eau, filtrer avec une passoire ou un chinois. Jeter le pulpe réhydraté de tamarin pressé. Réserver le jus.
  • Laver, égoutter, sécher les herbes, les tomates, les gombos et les tiges de taro.
  • Peler, hacher finement les gousses d’ail. Peler et hacher grossièrement l’oignon.
  • Supprimer la tête et la base de l’ananas. Peler le fruit. Ôter les « yeux ». Trancher en quatre dans le sens de la hauteur. Utiliser seulement le quart si c’est un grand ananas. Sinon 1/2 si c’est un petit. Réserver le reste pour le dessert ou pour une autre utilisation. Couper l/4 d’ananas en tranches moyennement épaisses. Réserver.

  • Couper les tomates en quartiers.
  • Couper la tête, puis en biais, en deux ou trois parties, les gombos.

  • Peler les tiges de taro comme les tiges de rhubarbe. Couper en biais, de 2 à 3 cm de large.

  • Couper finement la coriandre longue et épineuse ou la coriandre habituelle (le persil chinois). Couper finement une partie de l’herbe à paddy. Garder quelques feuilles entières pour décorer la soupe.
  • Faire frire 3 gousses d’ail finement haché dans un fond d’huile chaude jusqu’à ce que ça prenne une couleur dorée. Arrêter la cuisson aussitôt. Transvaser l’ail frit immédiatement dans un bol, sans l’huile. Réserver.

  • Laver le poisson, réserver les darnes de poisson (merlu, mulet, pangasius, etc…). Si option ailes de raie, couper chaque aile en deux.

  • Dans une grande casserole ou une marmite, faire revenir l’ail et l’oignon hachés dans un peu d’huile. Puis ajouter quelques quartiers de tomate. Faire revenir. Ajouter les morceaux de poisson et les faire revenir pendant 5 minutes environ.

  • Pendant ce temps, faire bouillir 1,5 litre d’eau. Verser sur le poisson. Ajouter le jus de tamarin, l’ananas et les tomates restantes. Cuire quelques minutes jusqu’à nouvelle ébullition (environ 10 minutes). Goûter puis assaisonner avec le nuoc mam, le sucre et le sel. Avec l’option de l’aile de raie, on mettra la raie seulement après avoir versé l’eau bouillante sur l’ail, l’oignon et les tomates revenues à la poêle.

  • Ajouter les gombos, les tiges de taro en tranches. Poursuivre la cuisson pendant 10 minutes. Ajouter les germes de haricots mungo. Goûter, rectifier l’assaisonnement si nécessaire (il faut que la soupe soit à la fois acide et un peu sucrée et salée). Poursuivre la cuisson encore 5 minutes et éteindre le feu.

  • Sortir le poisson de son bouillon et le déposer dans une assiette séparée, arrosé de nuoc mam pur, non dilué.
  • Ajouter à la soupe les herbes aromatiques coupées, ainsi qu’un peu d’ail frit dans chaque bol et facultatif, quelques rondelles fines de piment (pour ceux qui en veulent).
  • Servir chaud, en même temps que le poisson arrosé de nuoc mam non dilué et de piment.

Service :

Et voilà une soupe exquise du sud du Vietnam colorée, riches en parfums et saveurs, et qui plaît énormément aux enfants par son côté aigre-doux !

Bonne dégustation à toutes et à tous !

Poisson mijoté à la vietnamienne (Cá kho tộ)

Le poisson mijoté à la vietnamienne ou poisson au caramel, en vietnamien cá kho tộ  ( = poisson / kho = cuire dans la saumure de poisson / tộ = grand bol), est un plat très populaire au Vietnam. Très simple, délicieux et parfaitement en accord avec le goût des Vietnamiens, ce plat se cuisine avec diverses variétés de poisson du pays comme le panga (pangasius de deux variétés : en vietnamien, cá basa ou cá tra), le poisson à tête-de-serpent (cá lóc) ou le poisson-chat (cá trê).

Avec 3.400 km de côtes, le fleuve rouge dans le Nord et le fleuve du Mékong dans le Sud, le poisson (d’eau douce et de mer) au Vietnam est la première source de protéines et tient une place extrêmement importante dans l’alimentation. Il est quasiment présent à tous les repas, frais, séché ou le plus courant, sous forme de saumure comme le nuoc mam (saumure de poisson, condiment national du Vietnam, en vietnamien nước mằm) ou le mắm (saumure fermentée) en usage dans les préparations (marinade, assaisonnement, sauce). Son importance est telle, qu’on l’associe à l’attachement maternel, dans un proverbe du sud du Vietnam.

Không có gì bằng cơm với cá, (Rien ne vaut le riz avec le poisson).

Không có gì bằng má với con. (Rien ne vaut la mère avec son enfant).

Hors du Vietnam, en Occident, suivant le pays où l’on réside, on trouve de délicieuses adaptations de recettes avec du saumon, du maquereau, de la daurade, etc. On peut également trouver ces poissons du Vietnam au rayon des surgelés dans certains magasins d’alimentation asiatique en France ou même le panga frais, très répandu ces dernières années en Europe… Sur la question du panga, je ne polémiquerai pas là-dessus mais je vous invite à vous documenter pour vous faire votre propre opinion. Personnellement, sans aucun jugement, la France étant déjà pourvue d’abondantes variétés délicieuses de poissons, je préfère adapter la recette avec celles du pays dans lequel je vis.

Les préparations de ce plat varient d’une famille à l’autre, d’une région à l’autre. Invariablement dans toutes les versions, le caramel (non pâtissier!), la saumure de poisson non diluée, le poisson, le poivre et le piment sont présents. Dans le sud, on l’agrémente encore de quelques petits morceaux de poitrine de porc pour varier le goût et la texture du plat, mais aussi pour montrer une certaine abondance. En effet, dans le passé, le poisson et les produits issus des rivières et de la mer étaient les aliments du quotidien. La viande était moins présente, mais réservée pour les repas de fête, les cérémonies funéraires ou les offrandes. Ajouter de la viande dans un plat de poisson est (aussi) en quelque sorte un signe de richesse.

Comme toujours, les recettes sont très variées. Si habituellement on fait le caramel au moment de la préparation, certains font usage du caramel industriel prêt à l’emploi (mais je le déconseille) ou du caramel de coco; l’emploi des oignons ou d’échalotes; de l’ail ou pas; de la ciboulette chinoise ou sans; le poisson mariné au préalable ou pas; la cuisson avec l’ajout d’eau ou d’eau de coco; et enfin, certains mettent aussi un peu de citron ou un peu de gingembre, ce qui est « moins authentique ». Peut-être une confusion avec un plat similaire au gingembre (cá kho gừng) ou au galanga (cá kho riềng). Mais pourquoi pas ?

Dans mon enfance, ce plat se retrouvait souvent à la table familiale. On le faisait souvent aux maquereaux pour son goût fumé particulièrement apprécié et en accord avec cette préparation à la vietnamienne. Mijoté doucement dans la marmite en terre*, le poisson nous offrait un fumet fabuleux… Je ne peux dissocier ce plat à la belle marmite en terre et à la joie de sa dégustation. Chaque fois que j’en vois, je me souviens aussitôt de ce merveilleux cá kho tộ de ma jeunesse, en train de cuire sur le feu, à la chaleur réconfortante de la cuisine. Une tendresse gustative étreint mon palais. Je salive… et j’ai envie de ressortir ma propre marmite…

*La marmite en terre ne s’utilise pas comme une marmite en fonte ou une casserole en inox, elle peut être utilisée sur flamme directe, mais pas trop vive. Il faut monter doucement la chaleur. Tout choc thermique peut lui être fatal. Il faut éviter de poser la marmite chaude sur une surface froide comme le marbre ou l’inox, mais sur du liège, un dessous-de-plat tressé, ou sur du bois. Le nettoyage se fait à l’eau chaude, sans produit vaisselle. Au sel, et si résidus, à tremper avec un mélange eau + bicarbonate de soude, puis frotter. En ce qui me concerne, je fais mon plat dans une cocotte en fonte ou simplement une bonne casserole en inox à fond épais, et je transvase dans ma belle marmite de terre. 

Voici la recette familiale remaniée du poisson mijoté à la vietnamienne ou cá kho tộ.

Pour 4 personnes. Préparation 25 minutes + 1 heure de marinade. Cuisson : 5 minutes + 30 minutes.

Ingrédients :

  • 600-700 g de darnes de saumon de 2 cm d’épaisseur environ (ou lotte, maquereau,…)
  • Facultatif (à la mode du Sud): 100 g de poitrine de porc (non salée) coupée en lardons
  • 2 échalotes hachées
  • 3 gousses d’ail hachées
  • 2 à 3 tiges de ciboulette chinoise
  • Facultatif et selon goût : du piment rouge entier ou ciselé.
  • 3 cuillères à soupe de nuoc mam (saumure de poisson – je conseille la marque Phú Quốc si vous en trouvez)
  • 1/2 cuillère à café de sel fin
  • 2 cuillères à soupe de sucre (pour le caramel)
  • 2 cuillères à soupe d’huile végétale (par ex. tournesol)
  • Poivre noir moulu
  • Sel pour rectifier si besoin.

Préparation :

  • Laver les darnes de poisson. Nettoyer et sécher.
  • Hacher l’échalote et l’ail.

  • Dans un récipient large, mettre le poisson à mariner pendant une heure avec un peu d’échalote, d’ail hachés, du sel et du nuoc mam (saumure de poisson).
  • Dans une marmite en terre (idéalement – mais dans ce cas, pas de feu vif et éviter à tout les chocs thermiques qui risquent d’éclater votre marmite), en fonte ou casserole en inox à fond épais, faire chauffer à feu vif le sucre et l’huile pour caraméliser le sucre. Ne pas hésiter à remuer (contrairement au caramel habituel). Une fois doré et caramélisé, ajouter le reste d’échalote et d’ail, faire revenir très vite.

  • Ajouter les petits morceaux de poitrine de porc et faire revenir 5 minutes.
  • Ajouter enfin le poisson avec sa marinade. Poursuivre la cuisson quelques minutes puis retourner les darnes délicatement. Facultatif : Ajouter le piment rouge. Verser environ 300 ml d’eau (ou d’eau de coco). Amener doucement à ébullition, puis baisser à feu doux et poursuivre la cuisson pendant 20 à 30 minutes. Goûter, rectifier si besoin avec un peu d’eau si trop salé ou un peu de sel si pas assez salé. Poivrer.

  • En fin de cuisson, poivrer largement (selon goût). Ajouter la ciboulette chinoise coupée en tronçons de 4 à 5 cm environ (et facultatif : quelques rondelles de piment rouge). Arrêter la cuisson. Servir chaud.

Servez ce plat avec du riz blanc Thaï parfumé, accompagné de liserons d’eau sautés à l’ail (ici), de quelques légumes aigres-doux (ici) ou des germes de haricot mungo au gingembre (ici) et une soupe au tamarin (canh chua ici), le repas sera exquis ! Bon appétit !